Pourquoi Hollande? Quand Martine croit tomber sur un mou et tombe sur un os.

 

Le débat d’hier a enfin révélé ce que ses proches savent depuis longtemps. François Hollande n’est pas l’homme dépourvu de caractère que l’on a bien voulu dépeindre à volonté  pendant cette campagne des primaires citoyennes.

J’ai vu d’entrée un avantage à François sur l’affaire de la gauche dure. Résolument offensive, Martine Aubry l’a de nouveau attaqué insidieusement ne parlant plus de « gauche molle », elle a toutefois estimé que« face à une droite dure, face à une crise qui dure, il faut une gauche forte ».  C’est la réponse de François Hollande qui n’était pas attendue:« On sort de cinq ans d’une présidence brutale, et on serait une candidature sectaire ? Non, je ne le suis pas. » Il a  ensuite évoqué une gauche de sincérité, de vérité.

Le ton était donné. Sans jamais franchir la ligne jaune, on avait compris qu’il ne s’en laisserait pas compter.

On l’a parfaitement vu sur la question du cumul des mandats, à propose de laquelle Martine entretenait sciemment un flou, laissant penser qu’elle seule était contre. la réponse a été claire, voire cinglante.« Moi j’ai un principe incontestable je respecte les décisions de mon parti », a dit François , en référence à la décision de l’ex-première secrétaire de différer sous la pression des élus PS, l’application de la règle de non-cumul votée au sein du PS à l’après 2012. Reste une petite différence : Hollande n’appliquerait la loi qu’en 2014, Aubry en 2012, mais il fera voter cette loi dès l’été. Son engagement a été on ne peut plus clair.

C’est de ce point de vue là qu’il a gagné ce débat plus que sur le fond où les deux ont été à la hauteur. François a été meilleur, plus précis sur l’économie. Sur la règle d’or, on l’a vu répondre très précisément à Martine qui était floue en mélangeant à dessein l’inscription dans la constitution voulue par Sarkozy et son inscription dans une loi organique votée par le parlement, proposée par François.

Idem sur l’éducation un peu plus tard. Le nombre de postes d’enseignants à créer a fait de nouveau débat. Selon François, il serait nécessaire de créer 60000 postes, mais il prend la précaution  de préciser qu’il ne s’agira pas uniquement d’enseignants.  Martine a contesté ce chiffre.« 60.000 fonctionnaires, c’est bien 2,5 mds d’euros ? Donc tu mets 2,5 milliards ?… ». François Hollande répond en évoquant le coût du redoublement et s’en suit une tentative fumeuse de Martine pour tenter d’expliquer aux gens qu’il crée 60000 postes mais qu’il les supprime par ailleurs puisqu’il supprime le redoublement, dont elle même convient qu ‘il est nettement suupérieur  aux autres pays européens en France. François est obligé de repréciser qu’il s’agit d’allèger les effectifs des classes, donc ce sont des créations d’emploi réelles.

Sur la réforme des retraites que propose le PS, tout le monde a compris qu’ils sont d’accord même s’ils ont voulu nuancer sur la penibilité, l’affirmation du droit à le retraite à 60 ans  a été claire de part et d’autre. Martine a essayé une destabilisation  en évoquant une prise de position du député de l’Ardèche Pascal Terrasse, soutien de M. Hollande, qui aurait selon elle évoqué dans une « dépêche » un passage de l’âge légal de départ à 65 ans. « Tu as dû mal comprendre », a assuré M. Hollande, qui ne s’est absolument pas départi de son calme et la tentative a fait pschiittt.

Même tonalité sur les licenciements « boursiers », auquel finalement Ségolène Royal a rallié, l’un et l’autre. Non pas sur les licenciements boursiers à proprement dit mais sur une volonté commune  par rapport à laquelle François et Martine divergent uniquement sur des modalités d’application. Idem sur le thème du protectionnisme européen, cher à Arnaud Montebourg, Martine  et François  ont durci le discours.   Martine  a évoqué les « dégâts du libre échange » et sa proposition de « juste échange » qui est  une reprise de ségoleène 2007, tandis que François a trouvé la formule, se disant favorable à « l’économie ouverte, pas l’économie offerte » .

Martine a eu aussi de bons passages, notamment sur l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne ou elle a été plus complête, sur l’Europe en général, même si François a été plus audacieux en précisant à plusieurs reprises qu’il fallait en finir avec la règle de l’unanimité.

Sur la fin , il fallait parler de soi-même; pourquoi ils se considéraient comme le meilleur choix. Ce n’est jamais facile de parler de soi-même.

Là aussi, j’ai préféré François. « On a confiance en moi parce que je suis claire. François Hollande a changé de position sur certains points. (…) Le flou est la pire des choses », a lancé Martine Aubry. Cette affirmation qui a eu son écho pendant la campagne, était hors d epropos en fin d’émission alors que françois avait été très précis sur un tas de sujets.  « Chacun a son expérience et sa clarté, ça sera mesuré par les Français dimanche », a répondu François  avec une pointe de second degré dont il a le secret. Dans cette opposition de postures, chacun a gardé le positionnement adopté depuis le début de la campagne.  François a rappelé qu’il avai été candidat à l’age de 26 ans contre Chirac , puis qu’il avait gagné sa circonscription, puis Tulle, puis la Corrêze, en arrachant ces victoires à la droite. Rien ne lui avait été offert,  une allusion au fait que Martine a succédé, à Lille, à Pierre Mauroy, une succession préparée de longue date. Il n’a pas non plus hésité lorsqu’il s’agisait de comparer leur capacité de rassemblement à rappeler à Martine  le  congrès de Reims de 2008, dont il a dit  ne pas être protagoniste, et dont tout le monde sait comment il s’est terminé dans la nuit où Ségolène a été volée de sa victoire.

En résumé, Martine pensait tomber sur un mou, elle est tombée sur un os !